Les avocats ont affirmé, lors d’une conférence de presse, que Noureddine Bhiri est en situation de « disparition forcée ».
Le comité de défense de Noureddine Bhiri, dirigeant d’Ennahdha et député au parlement gelé, a annoncé hier avoir déposé des plaintes relatives à «l’enlèvement» de son client, dont une contre le Président de la République Kaïs Saïed, et une autre visant le ministre de l’Intérieur, Taoufik Charfeddine.
Ils ont affirmé, lors d’une conférence de presse au domicile de Noureddine Bhiri, qu’il était en situation de « disparition forcée », considérant que « la décision de le placer en résidence surveillée est intervenue dans le cadre de mesures de corrections ultérieures, c’est-à-dire qu’elle a été délivrée après son enlèvement et son transport vers une destination inconnue ».
Abderrazek Kilani, membre du comité de défense, a estimé que « Noureddine Bhiri est aujourd’hui en cas de disparition forcée, un crime puni par la loi et considéré comme l’un des crimes les plus graves », ajoutant qu’une plainte a été déposée auprès du Procureur de la République près le Tribunal de première instance de Tunis et du Haut-Commissariat aux droits de l’homme « contre toute personne responsable de ce crime ».
Samir Dilou, également dirigeant d’Ennahdha et membre du comité de défense de Bhiri, a expliqué que « l’arrestation se fait en vertu d’une décision de justice et doit être motivée, ce qui n’est pas le cas dans l’affaire Bhiri ».
Selon Dilou, « Bhiri se trouve actuellement au service de réanimation de l’hôpital Habib-Bougatfa à Bizerte, mais il aurait pu être, avant cela, dans une caserne de Rimel ou Menzel Jamil (Bizerte), un centre de formation agricole ou une maison de la région qui servait avant la révolution à détenir des opposants politiques », a-t-il supposé.
Des plaintes déposées auprès de l’Union internationale des avocats
Le comité de défense de Bhiri a également demandé l’ouverture d’une procédure disciplinaire contre l’avocat et ministre de l’Intérieur, Taoufik Charfeddine, pour « atteinte à l’honneur de la profession d’avocat, en prenant la décision d’enlever son confrère Noureddine Bhiri et de le violenter ainsi que son épouse avocate Saïda Akremi », a encore indiqué Samir Dilou. Il a ajouté que des plaintes ont également été déposées auprès de l’Union internationale des avocats, l’Union des avocats arabes, le Rapporteur spécial des Nations unies sur l’indépendance de la justice et de la profession d’avocat ainsi que le groupe de travail sur la détention arbitraire.
Il a, en outre, affirmé que des démarches seront entreprises auprès de tous les organes judiciaires et de défense des droits humains internationaux et régionaux concernés par les violations des droits humains, en particulier la détention arbitraire et les disparitions forcées.
S’agissant de la mobilisation du mouvement Ennahdha pour la défense du haut dirigeant Bhiri contre le peu d’intérêt manifesté envers Fethi Beldi, également assigné à résidence, Dilou a indiqué qu’un autre comité de défense était en train de se constituer pour représenter ce dernier.
Au sujet de l’arrestation, Saïda Akermi, épouse de Noureddine Bhiri, a déclaré que « vendredi dernier, des agents en civil à bord de trois voitures noires et une blanche ont procédé à l’enlèvement après les avoir agressés tous les deux ».
Elle a indiqué que « le procureur de la République et la justice militaire ont nié être au courant de l’affaire », et que « c’est la ministre de la Justice qui a confirmé le placement de Bhiri en résidence surveillée dans un lieu civil, après avoir nié précédemment avoir eu connaissance du dossier ».
Mme Akremi a tenu le Président Kaïs Saïed pour « responsable de la sécurité » de son mari, l’accusant de « viser Bhiri dans tous ses discours « et lui demandant de « fournir la preuve de tout ce qu’il avance ».
Vendredi 31 décembre 2021, le mouvement Ennahdha a annoncé que « des agents en civil ont emmené le vice-président du parti et député du Parlement gelé Noureddine Bhiri vers une destination inconnue », qualifiant l’arrestation d’ « enlèvement » et affirmant que Bhiri et son épouse, l’avocate Saïda Akermi, «ont été maltraités» au cours de l’arrestation.
De son côté, le ministère de l’Intérieur a annoncé, vendredi soir, avoir émis des décisions d’assignation à résidence à l’encontre de deux personnes, sans en préciser l’identité. Il a indiqué que la procédure intervient en application de la loi réglementant l’état d’urgence, notamment l’article 5 du décret n° 1978-50 du 26 janvier 1978, qui autorise le placement de toute personne en résidence surveillée afin de préserver la sécurité et l’ordre publics.